La sobriété énergétique en théorie et en pratique

Le café Agitaterre d’Avril a été une occasion de sélectionner des lectures pour comprendre nos usages de l’énergie et pour entendre les différentes façons de cheminer vers la sobriété énergétique.

Comprendre comment on faisait sans et pourquoi le pétrole a été une aubaine

Il n’est pas inutile de se plonger dans l’histoire pour comprendre à quel point mobiliser des énergies au rendement efficace a été perçu comme un vrai miracle au XIXe et XXe siècle. C’est en ce sens que la BD best seller de Christophe Blain et Jean-Marc Jancovici « un monde sans fin » a un rôle tout à fait utile, imagé et clair. Pour les personnes qui souhaitent avoir le même niveau d’information dans un format plus compact, sans l’humour mais avec le visuel sous forme d’infographies très lisibles, je recommande Energies dans l’excellente collection Fake or Not de Tana éditions.

Pour une approche plus sensible et visuelle de l’histoire, « vivre sans pétrole » des éditions plume de carotte propose un très joli catalogue qui raconte l’histoire de tout un tas de matériaux. Ces plantes racines et arbres étaient utilisés pour fabriquer nos objets avant le pétrole et le plastique. Le tout est illustré de très belles photos d’objets des collections exceptionnelles du Royal Botanic Gardens de Kew. Le lin, la courge, l’hévéa, l’ortie et l’indigotier n’auront plus de secrets pour vous!

Ecouter les différentes voix qui comparent les énergies à mobiliser demain

Bien sûr, lorsqu’on déroule les différentes hypothèses pour notre gestion future de la bascule vers l’épuisement des ressources fossiles, on va trouver bon nombre d’analyses, issues de notre culture française, qui placent le nucléaire parmi les énergies les plus efficaces à mobiliser à moyen terme. Ils vont donc parler d’énergie décarbonée. D’autres scénarios, comme ce lui de Négawatt présenté lors du café Agitaterre de février, permettent de nuancer les possibilités en se centrant plus majoritairement sur les énergies renouvelables.

Pourtant, il faut aussi prendre en compte les impacts déjà vécus et à venir du nucléaire, qui sont souvent minimisés par la culture politique des élites françaises cartésiennes.

Des récits en BD viennent nous rappeler la réalité de la problématique de l’enfouissement des déchets nucléaires. Comme la BD militante et très bien documentée « Cent mille ans » qui retrace l’histoire de l’opposition au projet d’enfouissement à Bure. La BD « le droit du sol » d’Etienne Davodeau, dans un genre plus contemplatif, dessine une marche à travers le sol de la France, depuis la grotte de Pech-Merle, jusqu’à Bure, avec des rencontres d’experts qui viennent appuyer la réflexion de l’auteur sur le sol, la façon de le parcourir et ce que nous y laissons pour les générations à venir.

Pour refroidir les ardeurs de ceux qui pensent que le salut énergétique est dans l’évanescence du cloud, je recommande aussi « l’enfer numérique » de Guillaume Pitron qui est assez implacable – et démoralisant, il faut bien le dire. Le numérique sera un des plus gros consommateurs d’énergie et de ressources dans le futur et si nous avons intégré la mobilité douce, il va falloir très bientôt penser à la connexion douce… Un article est consacré aux lectures sur ce sujet.

Enfin, concernant les dégâts environnementaux et humains provoqués par les accidents nucléaires, je pense que nous balayons bien trop vite l’expérience de Tchernobyl et de Fukishima. Trop loin de chez nous? Pour corriger cet aveuglement bien français, les âmes courageuses pourront se plonger – avec un paquet de mouchoirs – dans la lecture des témoignages recueillis par Svetlana Alexievitch dans « la supplication ». L’un de mes plus gros choc de lecture. Il a d’ailleurs inspiré une très bonne et très réaliste série Tchernobyl.

S’approprier la sobriété énergétique: notre point de consensus

En tout état de cause, le point de convergence de tous les débats nous amène à une unique conclusion: il faut qu’on se calme et qu’on consomme moins d’énergie. De multiples livres pratiques vous proposent des façons de changer vos habitudes. A titre d’illustration, pour l’énergie dans la maison, j’ai relevé, dans la belle collection résiliences « faire son bois de chauffage » où on vous apprendra même le yoga du bucheron, et « la maison résiliente » chez éditions du Terran , très complet sur les techniques pour construire ou rénover un habitat autonome en énergie.

Qu’on se cache derrière notre petit doigt ou pas, le sujet que nous allons devoir traiter sera la décroissance. Si il faut lire -et faire lire- un livre sur le sujet en ce moment, c’est « ralentir ou périr » de Timothée Parrique. Accessible et très clair, engagé sur une autre vision de l’économie mais écrit par un économiste solide ayant fait un travail de recherche reconnu, il nous permet de questionner de façon réaliste notre vision de la croissance et de la réussite.

Et enfin, pour illustrer la recherche de solutions, deux couples ont arpenté l’Europe en van, pour lister des initiatives et solutions bonnes pour un monde plus sobre. Selon votre sensibilité, vous préférerez les portraits de vies alternatives frugales et engagées présentées par Hélène de Sideways ou la balade très structurée de Célia et Léo de Twomorrow, présentant des projets techniques et des innovations (souvent low tech ou numériques mais pas que) pour inspirer l’initiative et l’entrepreneuriat durable de demain.

Et pour décoller vers un ailleurs ou la vie est vraiment frugale et le lien à la nature habite les hommes, il faut se plonger dans les étonnantes couleurs d’aurores boréales des Pizzlys, la BD de Jérémie Moreau qui vous emmène en Alaska et dans les croyances animistes. La sobriété n’empêche pas de rêver en couleurs…