Quand la Science-Fiction écologique nous donne envie d’un futur radieux

Vous êtes plutôt dystopie post-apocalyptique ou SolarPunk? Depuis quelques temps la Science-Fiction écologique met ou remet à l’honneur l’Utopie et fait (enfin) un peu d’ombre à l’Apocalypse.

Dépoussiérer les vieux romans de SF visionnaires

Avec le recul et parmi la foison de romans de SF dystopiques post-apocalyptiques, il est toujours excitant de retrouver des perles, écrites par un auteur parfois incompris, parfois en décalage avec le courant de son époque.

C’est le travail très malin effectué par l’éditeur le passager clandestin avec sa collection dyschroniques. Retrouver des nouvelles de SF étonnantes, qui résonnent avec l’actualité et les contextualiser pour comprendre ce qui a pu amener l’auteur à construire cette vision du futur.

Dans cette collection j’ai particulièrement relevé « A l’état de nature » de Damon Knight écrit en 1954 . Il imagine des villes aseptisées vivant de trafic de déchets recyclés et des « bourbeux » qui vivent en petites communautés à la campagne, chevauchant des animaux, faisant pousser leurs maisons, leur nourriture et leurs matières premières. Les premières se savent condamnées et un monde rural créatif et sobre prend progressivement le dessus. Étonnant et revigorant!

Découvrir et redécouvrir nos brillants écrivains français de SF ou non

En littérature française, la frontière entre la SF et les autres formes littéraires se fait de moins en moins nette. Et de nombreux auteurs plongent dans des utopies/dystopies où l’état de la planète est souvent très présent.

Il est incontournable de citer Alain Damasio comme porte-drapeau d’une SF qui porte notamment dans « les Furtifs » un message politique fort pour un monde alternatif plus solidaire et plus durable porté par une langue et un imaginaire follement riches, crédibles et imagés. Un porte-étendard du renouveau du genre.

Nous avons aussi des auteurs, non issus de la SF, comme Sandrine Collette qui dans « Et toujours les forêts » exécute un tour de force: montrer un monde après un cataclysme, où la nature et la civilisation ont été totalement ravagées et y faire avancer des humains qui, malgré tout, cultivent un minuscule espoir sans relâche. Un roman dur mais résilient, impressionnant.

Pour les amoureux du style, on trouve aussi Antoine Volodine, une plume géniale et atypique qui a inventé pour tout ses romans un monde d’apocalypse post-exotique, post-soviétique post-nucléaire, post-tout-ce-que-vous-voulez. Un univers fantastique et glauque, foisonnant et sauvage, hyper industriel et hyper naturel à la fois, où tout le monde est vieux et déglingué mais ne meurt jamais, où les noms et l’humour grinçant étincellent et l’idéologie totalitaire survit en spasmes. Si vous aimez les mots, lisez « des Anges mineurs » et « Terminus radieux ».

Le journal datait du siècle dernier, mais les nouvelles étaient encourageantes.

Antoine Volodine -Des anges mineurs

Des poids lourds de la SF américaine « verte »

la Science-Fiction américaine est une vaste contrée et je ne me risquerai pas à en faire une synthèse, n’étant pas une experte. J’en extrairai juste quelques exemples. Un certain nombre d’auteurs reconnus ont investigué plus particulièrement le champ d’une SF à dimension écologique.

L’une des écrivaines les plus reconnues, qui a amené un véritable renouveau en intégrant une dimension de sciences humaines dans la Science-Fiction (écologie, anthropologie, sociologie,..) est Ursula Le Guin dont « le nom du monde est forêt » écrit en 1972 (dans le cycle de l’Ecumen) a inspiré Avatar.

Pour donner d’autres exemples, je citerai bien sûr « Dune » de Frank Herbert, mais Margaret Atwood s’est aussi essayée au genre écologique avec une trilogie moins connue chez nous que « la servante écarlate« : « le dernier homme », « le temps du déluge » et « Maddaddam ». Un autre classique du genre, en mode assez optimiste est « Le monde vert » de Brian Aldiss écrite n 1962.

SolarPunk et fabrique de nouvelles utopies

En réaction au cyberpunk et autre steampunk, aux Etats-Unis des auteurs et autrices se réclament maintenant du mouvement Solarpunk: une écriture de fictions qui mettent en avant un futur plus radieux intégrant une dimension écologique, des solutions plus lowtechs et des pistes pour des énergies plus durables dans le respect du vivant.

En France, on peut mettre en avant « Siècle Bleu » thriller écologique singulier et très efficace en 2 tomes, commencé en 2010 par Jean-Pierre Goux, mathématicien de formation. Il cherche des voies sensibles et nouvelles pour acculturer à l’écologie. Il a été édité par La mer salée, maison d’édition qui a à coeur de proposer des écofictions et des utopies positives.

« La part cachée du monde » d’Eve Gabrielle fait également partie de leur production. C’est une utopie dynamisante et chaleureuse où la résilience et la solidarité ont une grande place. Dans une France du Sud des collectifs imaginatifs résistent face à une France du Nord paralysée par son autoritarisme technologique.

Et si on donnait vie à nos propres utopies?

Ces récits et bien d’autres, existants ou à venir, peuvent nous donner de la matière, pour écrire et imaginer dans nos territoires, nos associations, nos écoles où nos entreprises, le monde tel qu’on voudrait qu’il soit.

S’y voir, se dire qu’on est nombreux à en avoir envie, constater que certains ont déjà fait des pas dans cette direction, donne le courage d’expérimenter. Il sera bien temps ensuite de croiser le souhaitable avec le possible. Des ateliers utopistes ça ferait du bien non? On s’y met?